Bush, ou la religion contre les droits individuels

Publié le par Princess et Nam

Princess et Nam ont l'habitude de traiter leurs articles avec légèreté mais en lisant les news, il est parfois difficile de garder le sens de l'humour... Lorsqu'on a été élevé dans un pays laïque, l'une des premières choses qui frappe sur la Terre de l'Oncle Sam est la part impressionnante que prend la religion dans la prise de décisions et particulièrement quand il s'agit de décisions prises par le gouvernement !

Dans un pays laïque comme la France, le sujet épineux de la libre contraception et de l'avortement a été semble-t-il résolu par une loi proposée par Simone Veil en 1974. Aux États-Unis, l'avortement est autorisé depuis l'affaire "Roe contre Wade" en 1970 qui a abouti, grâce au soutien du quatorzième amendement de la Constitution Américaine, à une loi en faveur de l'avortement. La contraception avait été mise en place depuis 1960 grâce à Margaret Higgins Sanger, activiste féministe qui a également fondé la version américaine du planning familial : Planned Parenthood Federation of America. Mais, depuis, le débat a sans cesse été relancé car, sur la Terre de l'Oncle Sam, la séparation des Pouvoirs (Religion et État) n'a pas eu lieu. Les libertés religieuses et de culte sont mises en avant, ce qui induit une constante remise en cause du débat contraception/avortement.

La dernière remise en cause émerge d'un projet de loi de l'administration Bush. En effet, le Department of Health and Human Services est en train d'examiner un projet de loi qui limiterait le financement fédéral à tout hôpital, clinique ou autre centre médical qui ne tiendrait pas compte des convictions religieuses et idéologiques de leurs employés. Certains conservateurs, les opposants à l'avortement et certains membres du Congrès se félicitent de l'initiative qui a pour but de protéger les médecins, infirmières et autres personnels de santé qui, disent-ils, "sont de plus en plus confrontés à la discrimination en raison de leurs croyances ou sont contraints de fournir des services qu'ils trouvent répugnants". Mais le projet de loi suscite d'intenses critiques de la part du planning familial, des activistes féministes et d'autres congressistes qui estiment que ce projet "prévoit la création d'obstacles écrasants pour l'accès des femmes à la contraception et à l'avortement". Ils sont également préoccupés par le fait que la loi pourrait avoir d'autres répercussions. En raison de son ampleur, et parce que l'avortement serait défini par une loi fédérale à "tout ce qui touche un œuf fécondé", la loi pourrait soulever d'immenses interrogations concernant la qualité des soins et les retombées dans le domaine de la recherche scientifique. La Food and Drug Administration n'a pas formulé d'objection, mais plusieurs fonctionnaires au National Institute of Health (NIH) expriment de sérieuses préoccupations. Un chercheur du NIH, resté anonyme, a relaté les discussions internes : "C'est une redéfinition de l'avortement qui ne correspond pas à une des définitions médicales actuelles. Elle serait fondée idéologiquement et non pas scientifiquement, ce qui pourrait interférer avec le développement de nombreuses nouvelles thérapies". Les scientifiques ont exprimé une inquiétude croissante au sujet de la recherche sur les cellules souches, la stérilité et même le cancer. L'aspect le plus controversé de ce projet de loi est qu'il remet en cause tout acte pratiqué sur l'ovulation ou la fécondation et non pas seulement sur un embryon déjà implanté dans l'utérus. De plus, la loi s'appliquerait à toute personne qui participe à "toute activité ayant un lien logique à une procédure, des services de santé à l'activité de recherche ; cela comprend la saisie d'information, la formation et tous les secteurs de santé et de recherche".

S. Richard Myers, un professeur de droit à Ave Maria School of Law, dans le Michigan, a déclaré: "La liberté religieuse est une partie importante de l'histoire américaine. Ceux qui ont des convictions religieuses ou morales ne doivent pas être forcés à participer à un acte qu'ils jugent odieux". Cécile Richards, de la Planned Parenthood Federation of America a déclaré: "À un moment où l'accès aux soins de santé est à son niveau le plus bas, l'idée que l'administration Bush puisse créer davantage d'obstacles est franchement intolérable". Chaque être humain devrait est libre de pratiquer la religion qu'il souhaite, mais il existe des métiers pour lesquels les croyances ne devraient pas entrer en ligne de compte. La laïcité, en théorie, permet de faire la part des choses et, de fait, est censé protéger les libertés et droits individuels. Sur la Terre de l'Oncle Sam, ce principe n'existe pas... Si les médecins acquièrent le droit de faire passer leurs convictions profondes en priorité par rapport aux réalités scientifiques et au bien-être de leurs patients, qui pourra donner un avis éclairé et objectif aux patientes et qui pourra les guider dans l'une des décisions les plus difficiles de leur vie ?...

Publié dans Baltimore au quotidien

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C
Ce n'est certes qu'un projet de lui, mais qui pourrait bien voir le jour, c'est extrêmement dangereux tant pour la recherche que pour le soin médical. S'il y a bien UN domaine où la religion ne doit pas interférer, c'est la médecine. C'est extrêmement grave...A suivre, en espérant que Bush n'ait pas le temps de faire passer cette loi et que son successeur sera celui qui fera avancer les Etats-unis et non les faire reculer...
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P
Bientot, sur les badges et les plaques de medecin, a cote de Dr Tartampion, MD., il y aura un petit signe pour avertir de l'appartenance religieuse... Comme ca, les patients choisiront leur medecin en toute connaissance de cause !
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